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 « La guerre de Troie n’aura pas lieu. » ▲ priorité à Esprit des Chimères.

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Etoile des Vipères
Etoile des Vipères
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MessageSujet: « La guerre de Troie n’aura pas lieu. » ▲ priorité à Esprit des Chimères.   « La guerre de Troie n’aura pas lieu. » ▲ priorité à Esprit des Chimères. Icon_minitimeJeu 26 Juin - 12:57

(( JE TE TIENS UN PARI, ANDROMAQUE ))



« Cela ne te fatigue pas de ne voir et de ne prévoir que l'effroyable ? »

Lorsque le soleil s’était levé ce matin-là, la lune avait trainé quelques heures dans le ciel, à flirter avec lui, présence gracieuse dans le ciel mordoré. Etoile des Vipères l’avait dévisagée quelques instants, songeuse, son nez fauve levé vers les nuages, depuis le centre du camp, où elle s’était plantée pour donner les noms pour les patrouilles, écoutant les ragots d’une oreille distraite, légèrement irritée par la récurrence des noms de certains membres du clan du Tonnerre. Trop versatile, Âme Bohême ne se voyait attribuées que des tâches plus légères, et qui ne nécessitaient pas une régularité ; par peur que sa petite sœur n’oublie et qu’on lui reproche, Vipère avait pris l’habitude de désigner chaque matin les patrouilleurs. Elle aimait Bohême de tout cœur, et la protégeait ainsi à sa façon, bien que beaucoup voient ça comme une faiblesse de sa part, pensant que de cette façon on lui reprocherait à elle de ne pas lui laisser de terrain, plutôt que de courir le risque qu’on reproche à la lieutenante de ne pas faire son travail. Ces quelques ordres donnés, elle avait jeté de nouveau un long regard à la lune, qui la laissait quelque peu perplexe, qui la dérangeait ; quelque chose n’allait pas, et elle ne parvenait pas à mettre le doigt dessus, trop occupée à gérer le clan. Elle agita une oreille distraitement, puis aperçut sa sœur, et la chargea d’accompagner leur frère toute la journée chercher des herbes ; Esprit des Chimères lui avait en effet laissé sous-entendre qu’il commençait à être court, et elle préférait lui envoyer la mieux placée pour l’aider tout de suite, avant qu’elle ne soit prise par quelqu’un d’autre. Cela fait, elle arrêta un vétéran qui passait près d’elle, et se déchargea de la responsabilité du clan le temps de l’entrainement de Nuage de Chrysalide, lui annonçant qu’il était remplaçant pour la journée. Enchantée, vous semblez mourir de bonheur, très cher. Elle fit demi-tour après coup, et alla en effet chercher sa novice dans sa tanière, et mis un bon moment avant de la dénicher totalement autre part, comme à son habitude. L’entrainement occupa une majeure partie de la journée, sans pour autant empêcher Etoile des Vipères de jeter de temps à autre un regard consterné à la lune qui semblait tatouée dans le ciel, et qui, pas assez maigre, l’irritait quelque peu.

Ce ne fut que lorsqu’elle se fit cette remarque qu’elle comprit. Pas assez maigre. Si la lune s’arrondissait, c’était signe que la pleine lune arrivait bientôt. Or, la pleine lune était synonyme d’assemblée, et elle arriverait alors, meneuse du clan de l’ombre, sans même avoir été vraiment connue en tant que lieutenante. Un long frisson parcourut son échine tandis qu’elle rentrait au camp, précédée par la novice qui avait sûrement mieux à faire que de trainer avec elle. Rentrée à la base militaire féline, elle interpela un félin qui passait, lui enjoignant d’aller lui chercher son frère, pendant qu’elle s’engouffrait dans sa tanière, faisant voler derrière elle le rideau de lichen par son pas énergique. Elle s’assit contre un mur, adossée à lui, regardant dans le vague tandis qu’elle ramenait sa queue autour de ses pattes. L’assemblée. Putain merde. La réunion des clans était une véritable épée de Damoclès au-dessus de sa tête. Elle ne la sentait absolument pas. Lorsqu’elle prenait le temps d’écouter les rumeurs qui fourmillaient dans le clan, il lui semblait n’entendre parler que des autres clans, et elle détestait ça. C’était comme une présence oppressante constamment autour d’elle, comme une ombre sournoise, quelque chose de secret et de dangereux. Elle savait qu’elle serait là-bas en position d’infériorité, puisqu’elle était toute jeune meneuse, et que face à elle se tiendrait Etoile Nocturne et Etoile de Sureau, deux félins qu’elle méprisait particulièrement, mais qui hélas étaient ses supérieurs, et ceux depuis longtemps. Toute sa vie, elle avait compté sur son audace et son absence de peur des conséquences ; or, désormais, elle savait qu’elle devait naviguer avec prudence, et qu’elle n’était plus celle qui cherchait à couler le bateau pour s’en enfuir, mais bel et bien le capitaine de bord. Elle sentit son cœur s’affoler à cette idée. Elle n’avait jamais souffert ou regretté d’avoir la responsabilité de son frère et de sa sœur, d’autant plus que très vite, Esprit des Chimères s’était montré assez indépendant pour ne pas avoir besoin qu’elle repasse derrière lui sans cesse comme elle pouvait le faire avec Âme Bohême, mais porter sur ses frêles épaules le poids de tout un clan était le genre de fardeau qui lui coupait autant l’appétit que le courage. Elle soupira légèrement, jetant un coup d’œil lourd de sens au gibier qui trainait dans un coin de sa tanière et qu’elle poussa dehors d’une patte. Tournant de nouveau le dos à la porte, elle n’entendit pas réellement l’arrivée de son frère, perdue dans ses pensées, mais la sentit au souffle sur son pelage, ainsi qu’à l’odeur adorée de Chimères qui emplissait sa tanière, alors elle se tourna et enfouit son visage dans son pelage en guise de bonjour, avant de prendre la parole.
    « J’espère que ta journée a été et que Bohême n’a pas fait exploser ta tanière pendant que j’avais les yeux tournés, commença-t-elle en feignant un sourire, puis elle se rembrunit et cessa définitivement de jouer les enjouées. Ca me terrorise, Chimère. J’ai peur que ça se barre en couille, ou que je fasse de la merde, ou quoi que ce soit … Je sais pas, mais j’ai peur. Ouvrir ma gueule, quand c’était pour te protéger toi ou Bohême, c’était pas un problème, parce que je savais que je risquais rien, je savais aussi que mes mots valaient pas plus que n’importe qui d’autre. Maintenant, j’ai l’impression que la moindre erreur d’intonation que je fais peut valoir la guerre. Tu me connais mieux que personne, Chim, tu sais très bien comment je suis, tu sais très bien que moi tout ce que je veux c’est qu’on nous foute la paix et qu’on nous laisse galérer sans venir en rajouter encore plus. On a déjà assez morflé. Je veux pas qu’on déguste encore plus parce que j’aurais dit une connerie à l’assemblée, ou parce qu’ils m’auront cherchée, ou pour une quelconque autre raison qui me ferait passer pour une chef de merde, vous ferait pâtir puisque vous êtes ma famille, et au passage nous ferait nous prendre une guerre en travers de la tronche. Ca me rend vraiment anxieuse en vrai. »
Elle s’arrêta quelques instants, légèrement songeuse, tentant de réfréner un léger tremblement nerveux de ses babine supérieures. Puis, très vite, elle perdit patience et se mit à arpenter sa tanière en faisant les cent pas, agitant la queue dans l’air, les sourcils légèrement froncés.
    « J’ai peur Chimère. Sans déconner. J’ai vraiment peur. »
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MessageSujet: Re: « La guerre de Troie n’aura pas lieu. » ▲ priorité à Esprit des Chimères.   « La guerre de Troie n’aura pas lieu. » ▲ priorité à Esprit des Chimères. Icon_minitimeSam 28 Juin - 14:35

Je ne crois pas en Dieu, j'abjure et je renie




La fratrie n’était pas angoissée de nature. Le renouveau, cependant, les terrorisaient.

Pour faire passer son angoisse, Esprit des Chimères avait choisi les calmants. Etoile des Vipères l’avait envoyé avec son autre sœur, Âme Bohème, faire ses stocks. Il n’hésitait pas à en avaler en chemin, tremblant, haletant. Il était prit de ses habituelles angoisses quand la pleine lune arrivait, tel un nyctalope effrayé à l’idée de se transformer en monstre. La rouquine parlait à son frère, ce qui avait le don de décompresser et stresser le mâle écaille à la fois. Au moins, il restait dans un état tout à fait neutre en présence de sa sœur. Sa cueillette finie, il n’eut pas envie de croiser les chats de son Clan. Beaucoup soupçonnaient Bohème, Vipère et Chimères de comploter contre l’Ombre. Et s’ils savaient. Si ils savaient que la fratrie crevait de peur à l’idée de déclencher une guerre. Les conflits, Esprit des Chimères s’en fichait pour le moment. Les étranges rumeurs du côté du Tonnerre l’inquiétaient plus. On parlait d’un enfant issus d’une union interdite. Le chef et la guérisseuse ? Il n’appréciait pas beaucoup Fleur Sauvage, il ne connaissait pas Etoile Nocturne. Il l’avait vu de loin, sur le promontoire, avec cet air digne lors des assemblées, c’est tout. Fleur Sauvage, quant à elle, était plus méprisable selon le guérisseur. Elle était gentille. C’était son souci, avec son air de sainte – nitouche et de vierge effarouchée. Les angoisses d’Esprit des Chimères provenaient de ces étranges rumeurs. Il n’avait même pas l’envie de savoir si c’était seulement des dires ou des faits réels. Il s’en fichait. Il avait envie d’écraser cette affaire, l’enfoncer plus bas que sol et ne jamais en entendre parler, histoire de ne pas remuer de mauvais souvenirs. Lui, Esprit des Chimères, tomberait de haut si l’Ombre voyait en lui un monarque pourvu de sentiments.
Non. Hors de question. Il devait rester digne du Clan de l’Ombre, ne décevoir personne, rester tel qu’il était, porter fièrement son masque d’où tout le monde le voyait. Il était une teigne insensible, un calme par nature, un serpent venimeux, et non pas ce rêveur qu’il refusait d’être.

Et Etoile des Vipères dans tout ça ? Il ne s’imaginait pas à sa place. Lui angoissait pour de simples rumeurs incertaines, elle, elle jouait son image, celle de sa fratrie, celle de son clan, celle qui allait régner pendant tout son service en tant que meneuse. Il l’imaginait, tapie dans sa tanière, mourant d’angoisse. Il baissa les yeux une fois entrée dans son antre de chaman, se trouvant bien égoïste vis-à-vis de sa fratrie. Esprit des Chimères attrapa une feuille et y mit un peu de thym et de fenugrec pour l’appétit de sa chef tant aimée. Il connaissait sa sœur, elle ne mangeait pas lors de ses angoisses, et l’idée qu’une de ses sœurs tombent dans son délire l’effrayait. Il refusait de voir Vipères devenir comme lui, de la voir s’attirer les regards suspicieux des autres. Non. Vraiment. Il se sentait à la fois surprotecteur mais juste de s’inquiéter de la sorte. Il prit entre ses crocs son petit baluchon, délicat comme tout guérisseur et se dirigea vers l’entrée de la tanière d’Etoile des Vipères.

Le gibier était à l’extérieur. Il soupira et le prit avec lui pour lui redonner. Les temps étaient durs, donc la nourriture ne devait pas être gaspillée et jetée pour faute de faim. Il s’approchait de sa sœur, dos à l’entrée. Si songeuse, Vip. Gêné, Esprit des Chimères s’avança le plus doucement possible, à pas de velours pour ne pas la déranger. Malgré le fait qu’elle reste sa sœur, son haut grade l’impressionnait tout de même. Qui aurait cru que la si petite Vipère, si hargneuse, si rejetée, si détestée, soit un jour à la tête d’un Clan ? On lui aurait rit au visage, on l’aurait raillé s’il avait eu la quelconque audace d’évoquer cette singulière possibilité.

« J’espère que ta journée a été et que Bohême n’a pas fait exploser ta tanière pendant que j’avais les yeux tournés. Ca me terrorise, Chimère. J’ai peur que ça se barre en couille, ou que je fasse de la merde, ou quoi que ce soit … Je sais pas, mais j’ai peur. Ouvrir ma gueule, quand c’était pour te protéger toi ou Bohême, c’était pas un problème, parce que je savais que je risquais rien, je savais aussi que mes mots valaient pas plus que n’importe qui d’autre. Maintenant, j’ai l’impression que la moindre erreur d’intonation que je fais peut valoir la guerre. Tu me connais mieux que personne, Chim, tu sais très bien comment je suis, tu sais très bien que moi tout ce que je veux c’est qu’on nous foute la paix et qu’on nous laisse galérer sans venir en rajouter encore plus. On a déjà assez morflé. Je veux pas qu’on déguste encore plus parce que j’aurais dit une connerie à l’assemblée, ou parce qu’ils m’auront cherchée, ou pour une quelconque autre raison qui me ferait passer pour une chef de merde, vous ferait pâtir puisque vous êtes ma famille, et au passage nous ferait nous prendre une guerre en travers de la tronche. Ca me rend vraiment anxieuse en vrai. »

Anxieuse ? Vraiment Vipères ? Oh. Elle pesait ses mots ou bien ? Il aurait été terrorisé, plaqué au fond de sa tanière, essayant de se cacher dans le noir. Il aurait simulé la maladie, ou il se serait rendu malade pour ne pas y aller. Il était lâche, Chimères, mais ce n’était pas une nouveauté dans l’esprit de la foule. Il eut un maigre sourire. Vipères n’était pas du genre à angoisser autant. Etoile Nocturne et Etoile du Sureau allaient la juger dès le départ. Il savait que Sureau ne l’appréciait pas vraiment, et Nocturne se jugeait comme la diva de nos forêts. La confrontation des trois chefs allaient être sublimes. Restait Etoile des Ombres de la Rivière, cependant les rumeurs concernant sa disparition tournait. La forêt s’ennuyait – elle au point d’inventer milles rumeurs pour effrayer ses habitants ?

« Oh, tu es anxieuse. Vraiment ? » Cessons l’ironie mal placée et de mauvais goût. « Franchement Vip, je sais pas comment tu fais. Je suis déjà mort de peur à l’idée de remettre les pieds là bas, et pourtant je compte même plus le nombre de fois que j’ai été aux Assemblées en étant guérisseur. Je … »

Il marqua une pause. Etoile des Vipères était – elle au courant de ces étranges rumeurs concernant la guérisseuse et le chef du Tonnerre ? Surtout, s’intéressait – elle à leur cas ? Vip ne croyait pas aux rumeurs. Vip était une rationnelle la plupart du temps. Elle était du genre à vouloir vérifier par elle-même. Allait – elle le juger s’il évoquait sa crainte par rapport à de simples … dires ? Des commérages de reines ennuyées ?
Peu importait, ses craintes étaient justifiées. Il avait souffert et il crevait de sa relation avec Guérilla, et il avait sacrifié sa joie de vivre pour vivre son idylle. Il méprisait les guérisseurs qui ne s’assumaient pas, désormais.

« Je … Comment dire … Tu sais, Etoile Nocturne et Fleur Sauvage ? »

Sa voix devenait faible. Esprit des Chimères, en deux secondes tu étais passé de guérisseur hautain et fier à chaton en danger. Pathétique. Le mâle écaille prit une grande inspiration, tentant de contrôler son angoisse face à la situation. Si Etoile des Vipères cachait plutôt bien son anxiété, Esprit des Chimères était un piètre acteur face à sa sœur.

« Il y a des rumeurs. » déclara – t – il d’un ton grave. « Etoile Nocturne et Fleur Sauvage seraient ensemble. Tu sais, monsieur la diva et madame la pimpêche de service ? Cela dit, ça ne m’étonnerait pas trop. Mais … Enfin tu comprends Vipères. Tu comprends tout de toute manière. J’angoisse à fond pour ça. On dégustera pas par ta faute, Etoile des Vipères, je te le promets. Toute façon avec Bohème on hallucine déjà de te voir à chaque baptême si haut. Je te jure on dirait une sorte de messie à chaque fois ça nous fait tout bizarre là, au fond de l’estomac. On a les yeux qui brillent, de vrais gosses. Surtout moi en fait. Donc c’est déjà une fierté d’être arrivée si haut, donc les autres félins ont déjà un certain respect envers toi. Puis t’es une des seules chefs à oser ouvrir ta gueule sans faux semblants lors des assemblées. Vraiment Vipères, tu vas gérer comme t’as jamais rien gérer. Ecoute pas Nocturne, écoute encore moins Sureau, Ombres je ne l’ai jamais vue. Soi toi-même, l’Etoile des Vipères que tout le monde connait, avec la réputation qu’elle a mais le respect qu’elle a su s’attirer. »

Il n’était pas de bon conseil, et encore moins de bon réconfort. Ses discours étaient souvent décousus lorsqu’il angoissait. Il avait complètement oublié les rumeurs dans son laïus, occupé à tenter de décontracter sa sœur. Il avait pensé chaque mot qu’il avait prononcé. Pour Esprit des Chimères, Etoile des Vipères restait une grande fierté. La fierté de la famille.

« Et sinon, les rumeurs t’en dis quoi toi ? Je te jure, si c’est vrai … Enfin, si ils osent juste se regarder avec des regards bien évocateurs genre « je te fous enceinte à distance » je vais péter un câble Vipères. J’en ai marre de ces cons qui se croient tous permis parce qu’ils ont neufs vies. J’en ai marre de ces vierges effarouchées qui se jettent sur le plus haut placé et dans une idylle en se fichant des conséquences. J’ai … J’ai osé les affronter moi les conséquences. Alors je te jure, Vipères, s’ils osent dire une chose sur cette union, je … Je vais péter un câble. Je sais, c’est lâche. Puis c’est pas mon rôle. C’est toi la chef, c’est toi qui doit l’ouvrir de base, mais je pourrais pas, ça sera plus fort que moi. Comme si une bête hurlait en moi. J’essaierais de peser mes mots pour éviter de te foutre dans la merde. Et ça, c’est une promesse. »
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MessageSujet: Re: « La guerre de Troie n’aura pas lieu. » ▲ priorité à Esprit des Chimères.   « La guerre de Troie n’aura pas lieu. » ▲ priorité à Esprit des Chimères. Icon_minitimeLun 30 Juin - 20:53



« Il n'est pas malheureux, dit la souris, il a de la peine. C'est ça que je ne peux pas supporter. »

La réplique cassante de son frère hérissa légèrement le poil sur la nuque de Vipère, puis elle se calma en entendant sa voix redevenir plus douce.
Un léger sentiment de culpabilité se saisit d’elle, et elle détourna le regard, un peu honteuse de s’être vexée si facilement alors qu’elle connaissait pourtant le caractère de Chimère mieux que personne, Bohême mise à part. Et encore. Peut-être mieux que Bohème encore, elle ne savait pas vraiment ce que pensait Bohème, la légère Bohème, qui papillonnait avec une innocence si candide qui lui réchauffait autant le cœur qu’elle ne le serrait d’inquiétude. Elle ne pouvait pas prévoir ce qui se passerait si un jour elle cessait de surprotéger sa petite sœur, ni même si elle la laissait vivre par elle-même. Elle n’appréciait pas la couver de la sorte, mais elle ne pouvait pas se résoudre à la laisser battre de ses propres ailes, par peur qu’ils ne réalisent trop tard qu’elle ne pouvait pas voler. Bohème avait toujours été la petite sœur qu’elle devait protéger. Et si à l’Assemblée, pendant qu’elle serait loin d’elle, occupée sur le promontoire, quelqu’un fracassait la coquille de porcelaine qu’ils avaient toujours défendue autour de sa petite sœur ? Et si on lui faisait du mal ? Et si elle ne pouvait pas la protéger ? Elle se tira de ces pensées désagréables en se reconcentrant sur le discours de son frère, plus hésitant, plus tâtonnant cette fois. Elle posa ses grands yeux émeraudes sur lui, un peu surprise et surtout rassurée par les mots de son frère. Elle lui adressa un signe d’oreille en guise de remerciement, pendant qu’elle reprenait la parole.
    « On va y arriver Chim. On a pas trop le choix de toute façon. On doit leur montrer qu’on est plus soudés que tous ces connards qui essaient de nous faire du mal, on doit leur montrer qu’on est pas faibles, sinon c’en est fini de ce clan, et moi je refuse de donner raison à tous ceux qui crachent dans notre dos qu’on sera la perte du clan de l’Ombre. On a pas le choix. C’est affreux. C’est inexorable. Mais on doit le faire. »
Son frère se mit à balbutier en réponse. Un instant, elle crut que c’étaient ses mots qui l’avaient dérouté, ses paroles qui l’avaient déstabilisé, et elle s’apprêtait à intervenir pour s’excuser, pour lui dire que c’était pas grave, que s’il voulait il l’aurait, lui, le choix, que s’il voulait restait elle dirait qu’il était malade, qu’elle le couvrirait, qu’elle l’aurait couvert devant le monde entier et plus encore, qu’elle aurait été au bout du monde pour aller chercher son bonheur s’il avait suffit d’y courir pour que tout aille mieux. Tu sais, Etoile Nocturne et Fleur Sauvage ? Elle tressaillit légèrement, et plantant son regard brûlant dans les yeux de son frère, où elle crut lire une étincelle de peur, d’angoisse – comme s’il était perdu. Non, non je sais pas, dis moi Chim, dis moi ce qu’ils t’ont fait, dis moi tout, ils t’ont fait du mal, je t’en supplie, dis moi tout je suis là, ça va aller, je suis là mon Chim, je te protégerai, l’oublie jamais, je suis là. L’inquiétude, impériale et impérieuse, se mit à hurler en elle, la submergeant en une vague intense et violente. Son instinct maternel s’était violemment démultiplié, et elle se sentait terriblement impuissante face à la détresse qui brûlait dans le regard de son frère. Son jumeau. Son Chim, à elle et à Bohème, à personne d’autre.
Il se mit à parler, de façon décousue, des rumeurs qui courraient sur les deux félins. Elle les avait vaguement entendues dans la forêt, ou en passant devant la pouponnière, mais comme à son habitude, elle n’y avait pas prêté attention. Elle se fichait bien de savoir ce que faisaient ces deux connards de leur temps libre. Ils lui avaient toujours été antipathiques, trop cons chacun à leur façon, lui trop supérieur, elle trop naïve. Mais en voyant le visage de son frère, elle ouvrit grand ses oreilles, elle y prêta toute son attention. Le moindre de ses mots étaient, à ses yeux, paré d’un petit halo qui le rendait plus important que le reste du monde. Elle ne comprit pas tout de suite pourquoi il avait si peur, mais s’il était effrayé, c’était qu’il y avait une raison, et elle leur protégerait. Le surprotégerait même. Maman poule.

Esprit des Chimères changea vite de sujet, s’orientant sur ses peurs à elle, ses doutes. Les mots qu’il prononçait sonnaient comme des promesses dans l’air, la promesse qu’il serait toujours là quoi qu’il se passe, qu’il la défendrait toujours, qu’il était fier. Elle sentit son cœur s’emplir de reconnaissance envers son frère, sa gorge se serra un peu, et elle l’écouta en silence, un sourire ému se dessinant sur ses babines. Putain Chim. Il était le meilleur frère au monde, et Bohème la meilleure sœur au monde. Elle n’aurait pas pu demander mieux que cette famille. Toute l’assurance de l’univers entier, toute la confiance, toute la célébrité, rien ne valait l’union entre eux, le soutien, et encore moins les mots qu’ils avaient pour elle lorsqu’elle doutait. Les phrases de Bohème l’avaient sauvée. Celles de Chimère faisaient d’elle une combattante, une guerrière, un Héros, capable d’affronter n’importe quelle joute. Bohème était son élixir de vie, Chimère son philtre de courage. Un immense sentiment de fierté l’envahit à l’idée d’être de leur famille, et surtout, de les savoir fiers d’elle.
C’était vrai qu’ils n’étaient pas les meneurs idéals pour un clan, ni même les guerriers idéals. Ils n’avaient rien à faire dans une utopie. Ils auraient dû rester dans l’ombre, dans le silence, se taire et mourir inconnus. Au final, c’était eux que la vie avait choisi pour placer au sommet, et à la différence de beaucoup, ils étaient soudés. Avoir connu la douleur leur avait appris à la supporter, et à essayer de l’éviter pour les autres. Ils se savaient détestés, et savaient qu’ils avaient leurs preuves à faire ; alors Vipère donnait tout ce qu’elle avait, jusqu’à s’en épuiser, pour que le clan les respecte, pour que les autres clans les respectent, peu importe les sacrifices qu’elle aurait à faire, tant que Bohème et Chimère pouvaient vivre en paix et sans voir de problèmes.
    « Chimère, putain, je … Je sais pas quoi te dire. T’es le meilleur frère au monde. Je t’aime. Tu peux pas imaginer bordel, je serai plus rien sans vous, j’arriverais pas à avancer si je vous avais pas, heureusement que vous êtes là. T’imagine pas comme t’es capable de me rassurer. T’es magique. »
Elle se tut, et le laissa reprendre la parole. Par les mots qu’il prononça, elle se mit à comprendre petit à petit l’angoisse qui somnolait en son frère. Non, elle avait tort. Pas l’angoisse qui somnolait en lui, la peur terrible qui hurlait et qui risquait de l’emporter, de le noyer, et qui portait le nom de Guérilla. Son regard vert parcourut les courbes écorchées de son frère. Les os, saillants, étaient nettement visibles sous son pelage un rêche, malmené par les carences et les privations. Elle détestait Guérilla pour avoir fait ce mal à Chimère. Dans leur histoire, il avait perdu presque tout ce qu’il avait, et des fois, il lui semblait que si Bohème et elle n’avaient pas été là, il y aurait perdu la vie. Elle ne pourrait pas supporter une nouvelle fois de le voir s’éteindre à petit feu. Il parvenait à reprendre un peu de poils de la bête, à se donner l’envie de survivre, et elle ne pouvait pas accepter de le voir retomber à nouveau. Un intense sentiment de rage, de haine envers ce monde trop dur, de mépris envers l’humanité toute entier qui semblait s’acharner envers son frère, et plus encore envers Fleur Sauvage et son connard d’Etoile Nocturne, envahit soudainement la meneuse.
    « Chim, tu sais … Je m’en branle de me foutre dans la merde, à vrai dire. Tu peux te lâcher. Je les laisserai pas te faire de mal. J’en ai rien à foute de ces connards, ils peuvent gueuler autant qu’ils veulent, ils savent pas ce qui nous relie toi et moi. Bohème et toi, vous êtes ma raison de vivre. Je laisserai personne toucher à un seul poil de ton corps, et encore moins t’écorcher de l’intérieur. S’ils font quoi que ce soit, ils vont juste tourner notre première rencontre où je suis meneuse en une rencontre avec la pire furie qu’ils auront jamais vue, et ils s’en souviendront. Ils se souviendront de ce que leur amour de merde peut faire. Ils auront peur. Je m’en carre à un point de foutre leur vie, leur moral, tout ce que tu veux en l’air, personne te fera de mal. Je les laisserai pas, Chim, t’entends ? Je peux détruire tout leur amour s’il le faut, briser leur couple de merde par tous les moyens, je peux me trainer plus bas que terre pour les faire taire, si ça marche je le ferais. Je te le jure Chim. Je vais pas les laisser faire. Je serai là.

    Je les laisserai pas blesser le meilleur homme que j’aie. »
Elle pouvait passer pour une hystérique, pour une folle, pour n’importe quoi, elle s’en foutait. Le besoin de protéger sa famille cramait tout devant ses yeux.

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MessageSujet: Re: « La guerre de Troie n’aura pas lieu. » ▲ priorité à Esprit des Chimères.   « La guerre de Troie n’aura pas lieu. » ▲ priorité à Esprit des Chimères. Icon_minitimeLun 30 Juin - 22:41



J'essayais de manger mais, au contact
de la vie ordinaire, mon chagrin se ravivait.



Il l’écoutait comme un croyant écoutait son prophète.
Il avait peu de respect envers quiconque. Il avait prit pour habitude de mépriser les dires des autres, pour s’en protéger certainement. Il était conscient que ce stratagème ne fonctionnait pas tellement, et il s’en damnait. Chacun des mots de Vipères titillait une glande dans sa tête, c’était amer et agréable, il sentait une région de cerveau fonctionner à plein régime, le faire bégayer d’émotions. Oh oui. C’était bien ce mot qu’il cherchait. L’émotion. Lui, Esprit des Chimères, était ému. Drôle de contexte. Il était avec Etoile des Vipères après tout, tout était possible. Sa sœur était le genre de personnes qui le faisait vivre des situations incongrues, comme retrouver un sentiment de fierté, ou un semblant d’intérêt pour sa personne. Parler de l’angoisse de Vip lui faisait oublier la sienne. Après tout, il se jugeait bien trop fade et inintéressant pour avoir l’audace de se plaindre. Durant le temps d’un instant, Esprit des Chimères fut honteux de s’être confié. Pourtant il avait prit le meilleur profit du Clan. Derrière son air de chef dure et insensible, la meneuse de l’Ombre était une femelle à l’écoute. Peu de personnes le savaient. C’était un serpent écailleux au corps fragile. Ils étaient tous les deux des reptiles fragiles.
Soudainement, les mots de sa sœur l’étonnèrent. Il ne demandait pas la fin de l’idylle. Une telle requête relèverait du sadisme pur. Il était conscient que personne ne pouvait arrêter quiconque d’aimer quelqu’un, que ce soit à travers des lois ou des normes sociales. Il refusait leur vulgarisation, leur démonstration publique. Il redoutait cette Assemblée uniquement pour ces raisons. Le reste, il s’en fichait comme de sa première proie.

« Briser leur couple, étrangement, c’est pas tellement mon but. En fait j’ai pas envie qu’ils foutent un bordel pharaonique avec leurs conneries. Je pars du principe que l’amour, c’est interne et ça doit le rester. »

Il jeta un œil au plafond de la tanière de sa sœur. Ses yeux dégringolèrent le long des branches, caressant les taillis et les imperfections charmantes, effleurèrent mille et unes fois les rayons de lumières si doux pour sa rétine. A défaut d’être spacieuse, sa tanière était formelle. Elle était taillée pour un chat important.
Un chat important et seul surtout.

« La tanière des guerriers doit te manquer n’empêche … Enfin, la tanière des guérisseurs je suis habitué à crever seul là bas, et c’est devenu un vrai luxe je te jure ! C’est d’ailleurs pour ça que je crains comme la peste le jour où j’aurais une nouvelle pisseuse en apprentie. Du jour au lendemain t’es passée de sur-entourée à seule, ça ne t’a pas fait drôle ? »

Il jeta un regard entendu à sa sœur. Il s’inquiétait de la voir seule. Personne n’était là pour lui rappeler de manger. Il avait beau la voir comme l’ainée de la portée, Bohème comme la cadette et lui comme celui du milieu, il ne pouvait s’empêcher de tenter de protéger sa famille des dangers des privations. Il se haïssait pour ce qu’il était devenu, il refusait avec véhémence que sa fratrie goûte à son poison.

« Prend ça. » Il poussa son tas de plantes vers elle. « T’as du thym et du fenugrec. Le thym c’est pour calmer ton anxiété. Tu sais, je suis là actuellement, mais quand tu affronteras Sureau, Ombres et Nocturne, le sang froid ça fait toujours bonne impression. T’as une bonne dose pour que tu tiennes jusqu’à l’Assemblée. Ca t’aidera je pense. Quant au fenugrec … »

Il hésita à lui apprendre l’utilité de la plante. Il la connaissait, Etoile des Vipères. Elle allait lui demander pourquoi il n’en prenait pas, lui, au lieu de ses pousses de chêne pour s’anesthésier l’estomac. Esprit des Chimères n’avait lui-même pas la réponse. D’une certaine manière, il était habitué à sa maigreur excessive et à ses privations. Il les détestait, mais il en était dépendant. Drôle de sentiment. Sentiment de merde oui.

« Le fenugrec, alors. Oui, donc je disais. Le fenugrec c’est pour l’appétit. J’ai vu que le gibier était dehors et tu comprends je … Enfin … C’est dingue, j’arrive plus à parler. » Il angoissait. « Le fenugrec t’aidera à avaler le peu de gibier qu’on t’a ramené. Je te jure ma Vip, ça me fend le cœur quand tu refuses de manger. »

Il avait de l’enfer au bout de sa dernière phrase. Il disait être malheureux quand il voyait sa famille jeûnait. Il agissait comme l’égoïste qu’il était. Il se souciait bien sûr du regard de sa fratrie sur ses côtes ou sur ses joues creusées, mais au fil du temps, il avait développé un ressentiment de lassitude. Rêveur et imaginatif, il avait réussi à s’auto – persuadé que le monde entier le regardait avec indifférence, habitué de ses conneries.
Des deux, Etoile des Vipères était la plus regardée. Elle était le symbole de l’Ombre, l’allégorie de ses semblables. Si à l’Assemblée elle arrivait, nonchalante et tremblante du au manque de nourriture, quelle image allait avoir les autres chefs. Il se fichait de leur avis, mais il s’inquiétait des idées qui pouvaient naître dans leur tête. Lui, il n’avait pas de place privilégiée comme le lieutenant ou le meneur. Il pouvait, certes, s’approcher et être au premier rang, mais il n’avait pas une branche basse où se poser. Il était dans l’ombre et s’y plaisait. Personne pour le juger, pour laisser ses yeux exploiter les entrailles des gouffres de ses côtes. Non. Personne. Et bon sang que ça lui faisait du bien. Il pouvait rester sa vie à se plaire dans son rang.

« Avant, j’avais Bohème qui pouvait me dire si tu mangeais, Vip. Maintenant je sais plus. T’es la meilleure femme que j’ai, aussi, avec Bohème bien sûr. Je me sentirais coupable s’il t’arrivait une bricole sur le plan santé. En tant que guérisseur et surtout en tant que frère, c’est normal non ? Si un jour ton antre est trop grande et fonctionnelle pour toi, ma tanière en bordel t’ouvre les bras. C’est long des fois à attendre qu’un malade combatte ses préjugés et la peur de l’autre. »

Il l’avait vu dépérir aussi, quand Vol du Héron l’avait traînée plus bas que terre. Si Etoile des Vipères et Esprit des Chimères étaient si fusionnels, ce n’était pas juste leurs noms qui rimaient ou leurs carapaces fragiles qui s’entrechoquaient, c’était leur vécu. Ils avaient souffert, avaient goûtés aux idylles, s’étaient donnés corps et âme dans des histoires aux lendemains éphémères. Bien que la meneuse de l’Ombre remerciait chaleureusement sa fratrie pour l’avoir tirer de ses soucis, il se sentait coupable au fond de lui. Il aurait voulu être plus à l’écoute, plus là pour elle. Plus là pour elle oui. Il avait été distant, amoureux, stupide, niais. Il ne voyait plus la misère des autres oh non, il l’avait oublié. Il avait baissé les yeux sur son nombril, sur Agneaux, sur son amour, il avait oublié comment on reconnaissait les gens qui souffraient. Quel idiot il avait été, et quel idiot il continuait d’être.
Il frissonnait. L’idée que sa sœur ait été en danger lors de cette partie de sa vie le terrifiait. Il avait failli la perdre et il n’avait pas plus réagi que ça à l’époque. Il devait se rattraper maintenant. Son regard se fit plus dur, plus conquérant. Il était devenu un guerrier atrophié, un chaman magicien, un espion couvert de velours. Pour Vipères, il pouvait tout faire, se traîner plus bas que terre. Les liens du sang demeuraient les plus importants à ses yeux. Il savait qu’Etoile des Vipères et Âme Bohème ne l’abandonnerait jamais et qu’elles n’allaient cesser d’être elles même. Bohème avait cette force candide qui la protégeait du monde extérieur et certainement de l’amour, Vipères cette aura de guerrière prête à en découdre. Lui au milieu, il les alimentait du mieux qu’il pouvait. Il leur devait bien ça, à défaut d’être armé d’autre chose que ses mots.
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MessageSujet: Re: « La guerre de Troie n’aura pas lieu. » ▲ priorité à Esprit des Chimères.   « La guerre de Troie n’aura pas lieu. » ▲ priorité à Esprit des Chimères. Icon_minitimeLun 21 Juil - 11:05



« Toutes nos croyances les plus fortes et tous nos plus profonds symboles n'étaient-ils que vaines idoles déjà tombées et bientôt mortes ? »


Vipère ne s’arrêtait plus sur la douleur.
Depuis toute petite, elle avait fait passer sa douleur après les douleurs physiques, crevant les yeux, de Chimère et de Bohème. Elle s’était placée en retrait, jouant les grandes sœurs, et elle ne se confiait plus réellement depuis des lunes entières. Elle n’était pas de ces Juliette aux grands actes ni de ces Roméo aux grands discours ; elle n’avait jamais été de celles qui se pâment de leurs amours au vu et au su de tous, ni de ceux que l’on admire pour leur résistance et leur force face aux aléas de la vie et leurs difficultés. Elle avait fait de son corps un abîme de douleur pour purger celle de son esprit, elle s’était tue devant tout le monde et n’avait jamais voulu expliquer pourquoi elle s’était infligé ça. Jamais, au grand jamais, elle n’avait raconté la honte et la descente aux enfers aux autres, pas même à Esprit des Chimères ou à Âme Bohème. Ceux-là, par leur sens de l’observation et l’amour qui les liait à leur sœur, avaient compris que tout était en lien avec Vol du Héron, avec son amour, et avec leur rupture, sans pour autant connaître le moindre détail, se contentant des grandes lignes.
Chimère savait la douleur de l’amour. Bohème comprenait à sa façon. Ils avaient été son salut. Elle aurait été capable de tout pour eux, s’il l’avait fallu. Toucher un seul poil de l’un des deux la faisait immédiatement sortir de ses gonds et abandonner tout vœu de non-violence, de pacifisme qu’elle ait pu faire. Ils lui étaient plus chers que ne l’était à ses yeux sa propre vie, et elle était prête à risquer tout et n’importe quoi s’il l’avait fallu pour eux. Les mots d’Esprit des Chimères lui rappelèrent qu’une fois de plus, elle s’était emballée, qu’elle était prête à les faire souffrir le martyre pour avoir, par inadvertance, versé un peu d’acide sur la plaie ouverte et béante qui atrophiait le cœur de son frère.
Elle se tut, se contentant de poser son grand regard mordoré sur lui pendant qu’il parlait. Elle aimait l’écouter parler. Sa voix était berçante, rassurante. Elle n’aurait pas pu vivre sans cette voix. Elle adorait l’entendre mêlée à celle de Bohème, c’était comme une musique rassurante venue de leur enfance. Elle se laissa bercer par ses paroles, avant de se reconnecter à la réalité devant le regard insistant de son frère. Si elle se sentait seule, dans sa tanière ? Elle ne s’était jamais sentie aussi bien. Elle savait qu’il s’inquiétait pour elle, mais fit mine de ne pas s’en rendre compte. Elle ne voulait pas qu’on parle de ça. Elle ne voulait pas qu’il s’inquiète.
On ne s’inquiète pas pour les grandes sœurs.

« Oh tu sais, à la vérité, je suis bien mieux ici ! Au moins, personne pour me réveiller en criant, pas de couple pour languir en amoureux à un mètre de toi, pas de père qui revient épuisé en pleine nuit et s’effondre à moitié sur ta gueule parce que ses petits l’ont tenu éveillé toute la soirée avec la mère …, fit-elle avec un sourire. C’est le panard, en vrai. »

Elle passa sous silence les nuits blanches qu’elle enchainait, le froid transperçant lorsqu’elle se réveillait haletante après un cauchemar les rares fois où elle parvenait à dormir, les longues soirées esseulées le soir.
Elle se doutait qu’il allait arriver au sujet fatidique de son refus de manger. Elle le voyait gros comme une baraque, même un aveugle ne l’aurait pas loupé. Ça se humait, ça se touchait, ça pesait lourd dans l’atmosphère, comme une épée de Damoclès juste au-dessus de sa tête, et lorsqu’elle lui tomba fatalement dessus, elle contint son hurlement intérieur pour faire un sourire rassurant à son frère.

« Ecoute Chimère … Tu me connais comme je te connais. On sait tous les deux ce que c’est. On sait que c’est pas drôle, on sait que ça se vit mal, mais on sait aussi que chez moi, ça alterne. Tu sais que je vais maigrir, puis redevenir lucide, me rendre compte de ce que j’ai fait, m’affoler, grossir, et à nouveau maigrir. Je ne connais pas le juste milieu, et ça sera toujours comme ça, c’est laid à dire, ça fait froid dans le dos, mais c’est vrai, et tu le sais comme moi. Ça sert à rien d’épuiser tes forces dans ce combat, tu sais, Chim. Je vis comme ça. J’y arrive, ça marche, même si c’est dur quelque fois, mais c’est l’essence même de la vie que d’être difficile.
Je vais m’en sortir Chim. C’est pas pour moi qu’il faut s’inquiéter. Garde le pour toi, le fénugrec, tu en as plus besoin que moi. Tu sais que si je le mange, je vais me jeter sur toute la nourriture autour de moi, et je refuserai de le manger en me sentant sale, lourde, empâtée. Je survis. J’y arrive. Ne t’inquiète pas pour moi, soigne toi d’abord. »


Elle lui lança un regard insistant. Elle ne voulait pas qu’il s’inquiète. Elle n’aimait pas qu’on s’inquiète pour elle. Elle se sentait enchainée, entravée dans ses mouvements, lorsqu’un regard apeuré se portait sur elle sans cesse. Elle détestait ce sentiment d’être une petite chose à protéger, elle se sentait hypocrite et menteuse. Elle parvenait à vivre, elle continuait de rire, elle savait encore être heureuse – elle ne parvenait pas à se dire que ça allait mal. Elle n’était pas foncièrement malheureuse, il lui semblait qu’elle vivait encore avec la même joie, peut-être un peu plus teintée de désespoir et d’amertume qu’avant, peut-être avec moins d’illusion, mais toujours avec énergie. Elle était capable de ressentir. Elle savait toujours la rage, la tristesse, la joie, le rire, la fierté, l’amour. Elle n’était pas seule. Elle n’avait pas de raison de s’en faire pour elle, vu qu’elle se sentait bien. Et Chimère n’en avait pas plus à se faire.
Soucieuse de changer de sujet, elle lui fit un sourire rassurant, puis reprit de nouveau la parole, fronçant légèrement les sourcils.

« J’ai été faire mon premier entrainement avec Chrysalide. Ca me fait bizarre d’avoir de nouveau une apprentie. J’espère qu’elle sera un peu plus ouverte que l’abruti que j’ai eu avant elle. Tu as bien conscience, je suppose, que je le fais seulement pour toi. Je n’aime pas avoir de novice. C’est juste parce que tu me l’as demandé que je l’ai fait. Sinon, je lui aurai trouvé n’importe quel mentor qui aurait été mieux que moi. J’aurais pu lui proposer Jardin d’Eden ou Eclat de Lune, n’importe qui d’autre. Je me demande pourquoi tu as tellement voulu que je la prenne en apprentissage, et paradoxalement, je veux le savoir par moi-même. »

Elle lui jeta un regard perçant, ses babines s’étirant en un sourire mi-figue, mi-raisin.

« Tu devrais être fier de pouvoir faire ce que tu veux de moi de cette façon. Merci de me donner de quoi me torturer un peu l’esprit, ça faisait longtemps que je n’avais pas pris autant de temps à réfléchir à quelqu’un. »
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MessageSujet: Re: « La guerre de Troie n’aura pas lieu. » ▲ priorité à Esprit des Chimères.   « La guerre de Troie n’aura pas lieu. » ▲ priorité à Esprit des Chimères. Icon_minitimeMar 22 Juil - 0:00



when i'm feeling bad, i simply remember my
favourite things and then i don't feel so sad...



Elle lui vantait les mérites de la solitude.
Il ne savait pas quoi faire à ce moment là. Allait – il rester là, coincé dans sa bulle d’ignorance et s’y rouler en boule confortablement comme beaucoup faisait ? Il savait qu’Etoile des Vipères était pas le genre à parler beaucoup de son passé. Elle gardait tout pour elle, et Esprit des Chimères regardait ce cocktail Molotov bouillir avec appréhension. A la force de tout garder, la bombe allait déborder d’abord, sortant de chaudes larmes des yeux de la femelle, puis chaque choc déformerait l’obus qui exploserait, épuisé, réduisant sa victime à un état de légume au mieux, de zombie au pire. Il sentit une angoisse affoler son cœur, lui causer tremblements et perditions. Il niait tout en bloc ? Comme ça ? Il acceptait le mal être de sa sœur sans faire quelque chose pour secouer les gens, lui dire « mais aidez la bordel, aidez le ! Vous voyez pas qu’elle va dépérir ? Un jour ou l’autre ? »
Il voulait le pouvoir. L’Ombre veut le pouvoir. Tout l’Ombre entière. Guérisseur par choix, Esprit des Chimères voyait les guerriers comme une masse nauséabonde, criant au moins méritant mais au plus aimé pour s’entretuer facilement, nommant cet élu chef.
Etoile des Vipères ne répondait pas à leurs critères. Pourquoi elle avait été élue ? Beaucoup se posaient la question. Une cheffe trop pacifiste, cynique et une connasse de service pour certains, un guérisseur pas capable de se soigner lui-même pour d’autres, une lieutenante vraiment à l’ouest pour les uns. La monarchie de l’Ombre était hait, détestée, adorée, admirée. Elle était un thriller à elle seule, dans ses déboires et ses histoires de cœur et d’écorchures.

« Ecoute Chimère … Tu me connais comme je te connais. On sait tous les deux ce que c’est. On sait que c’est pas drôle, on sait que ça se vit mal, mais on sait aussi que chez moi, ça alterne. Tu sais que je vais maigrir, puis redevenir lucide, me rendre compte de ce que j’ai fait, m’affoler, grossir, et à nouveau maigrir. Je ne connais pas le juste milieu, et ça sera toujours comme ça, c’est laid à dire, ça fait froid dans le dos, mais c’est vrai, et tu le sais comme moi. Ça sert à rien d’épuiser tes forces dans ce combat, tu sais, Chim. Je vis comme ça. J’y arrive, ça marche, même si c’est dur quelque fois, mais c’est l’essence même de la vie que d’être difficile.
Je vais m’en sortir Chim. C’est pas pour moi qu’il faut s’inquiéter. Garde le pour toi, le fénugrec, tu en as plus besoin que moi. Tu sais que si je le mange, je vais me jeter sur toute la nourriture autour de moi, et je refuserai de le manger en me sentant sale, lourde, empâtée. Je survis. J’y arrive. Ne t’inquiète pas pour moi, soigne toi d’abord. »


Il rabaissa ses oreilles sur son crâne, se sentant chaton impuissant face à l’immensité de la situation. Il ne pouvait donc rien faire ? Ses jeûnes le terrifiaient, son refus l’affolait. Il devait donc attendre ? Esprit des Chimères était condamné à la voir maigrir à faire fuir un génocide, et reprendre du poids en se haïssant ? C’était laid à dire, ça faisait froid dans le dos, oh oui Vipères. Il lui offrit un magnifique sourire désespéré.

« Mais j’ai envie que tu te jettes sur la nourriture. Juste pour gommer les traits que t’as sur les côtes, juste pour qu’on voit à nouveau que t’as la hargne, même physiquement. Tu sais, on t’aime Vipères. Ne l’oublie pas, et tu serais jamais lourde ni sale pour nous. »

Il n’était pas bon pour les tirades. Redonner du moral aux gens, il le faisait en général avec des graines qui faisaient voir plein de couleurs, qui stimulait une région du cerveau, là, vers le milieu. Parfois, il avait les mots dans la tête, des sentiments à illustrer, mais les phrases ne lui venaient pas. Elles étaient décousues et sans sens. C’était comme si il était aux commandes d’un fabricant de puzzles à pièces manquantes. Il ne supportait pas cette impression et comptait bien s’en défaire.
Sa réflexion sur le fénugrec l’attristait aussi. Elle aussi, elle était de celle qui pensait qu’il devait tenter de se soigner ? Il se sentait misérable mais bien comme ça. Sa maigreur et sa santé étaient légendaires et il avait été mordu par le plus dangereux des serpents de sa maladie : le confort. Il était bien avec ses os apparents, son pelage terne, sa laideur omniprésente, ses dires médisants et ses malaises invivables. Peu à peu, ce mal être lui avait fait sa personnalité. Il était Esprit des Chimères le malade, le maigre, le désagréable à regarder, celui qui s’attirait grimaces et regards inquiets. Tout le monde se demandait jusqu’à où il pouvait aller à ne pas manger.
De son côté, Esprit des Chimères ne se donnait que quelques lunes.

Elle attaquait un sujet bien plus délicat et étrange pour le guérisseur écaille : sa protégée, Nuage de Chrysalide. Allez savoir ce qui avait attiré sa sympathie et son envie de protéger chez cette gamine pour qu’il daigne s’y intéresser. Elle avait toujours eu cet air de l’écorchée de l’intérieur, un peu comme sa propre fratrie. Elle l’avait intrigué, avec ce physique qu’on qualifiait facilement de laid. Non, Esprit des Chimères ne l’avait pas trouvé laide, intrigante oui, mais certainement pas laide. Son avis positif sur la jeune femelle ébène, il avait été un des seuls à l’avoir. Les répliques cyniques et méchantes de la pette en avait blessé plus d’un. Ils s’étaient détestés, lancés des poignards des yeux. Elle avait fini par s’ouvrir à lui, le cœur en miettes à cause d’un mâle trop charmant pour être vrai. Elle avait connu les écorchures et les douleurs de l’intérieur et Esprit des Chimères reconnaissait ce genre de mal intérieur, comparé à certains autres chats. Elle était restée un certain temps avec lui, dans sa tanière.
Il aurait pu la prendre en apprentie. Elle l’avait demandé. Il avait refusé avec ce sourire étrange et ce rictus sorti de nulle part. A ce jour, personne n’avait comprit ce refus.
Il avait juré de la protéger coûte que coûte. Désormais, avec Bohème et Vipères, il n’avait que peu de liens positifs. Chrysalide comptait énormément pour lui, il la jugeait comme une des seules apprenties prometteuses de l’Ombre. Elle n’avait pas beaucoup de talents physiques mais une réflexion poussée et un caractère à toute épreuve. Il avait longuement réfléchi pour son apprentissage, culpabilisant à cause de son refus injustifié. Il avait pensé à Jardin d’Eden mais eu peur que le félin n’abuse d’elle pour atteindre les hautes sphères de l’Ombre. Eclat de Lune aurait été parfaite, mais elle l’aurait ruminé sur son passé et Esprit des Chimères connaissait bien l’apprentie. Elle était néanmoins fragile sur ses faiblesses. Âme Bohème ? Elle était trop naïve et cette fois, il avait eu peur pour sa sœur. Une phrase assassine de Petite Chrysalide l’aurait démonté.
Au final, Etoile des Vipères avait le profil idéal. Elle était forte, digne de confiance, et elle allait lui apprendre la meilleure arme de la forêt : la paix. C’était la force de l’Ombre, ils comptaient sur le pacifisme de leur cheffe, mais sa fratrie savait ce qui avait tendance à la faire sortir de ces gongs.
C’est pourquoi Esprit des Chimères angoissait pour ce soir.

En entendant les dires de sa sœur, le guérisseur comprit une chose : L’apprentie semblait déranger sa sœur. Non pas par sa manière de penser, d’être ou de parler, mais par sa présence. Etoile des Vipères n’aimait pas avoir à entraîner une nouvelle recrue, et le mâle écaille le savait pertinemment. Son premier apprenti avait été une catastrophe, mais Nuage de Chrysalide n’était pas comme ça. Non. Pour le petit guérisseur, elle était complètement différente. Après tout, c’était une écorchée comme eux.

« Bien sûr que j’en suis fier, si tu savais. »

Le ton de sa sœur ne l’avait pas agacé non. Il sentait des reproches de partout, et à défaut d’avoir de la défense, il préférait temporiser la situation avec sa voix soudainement dure et cassante, accompagné d’un sourire disharmonieux. Non. Il n’appréciait pas qu’on juge sa protégée comme un vulgaire poids, comme les félins de son passé ont pu le faire. Esprit des Chimères croyait en elle, et il savait qu’avec Etoile des Vipères, elle était prête à faire de grandes choses. Elle n’allait pas être la meilleure guerrière, et elle s’accordait à merveille avec sa sœur pour ça : ce n’était absolument pas son but ! Il adressa un véritable sourire à sa sœur tant aimée, radoucissant son ton.

« Tu fais la mentor parfaite pour elle. Elle n’aime pas se battre. Etonnant hein ? Vraiment, elle serait tombée sur Jardin d’Eden il l’aurait peut – être tuée à la tâche ou il l’aurait éduqué à être aussi égocentrique que lui, et sur Eclat de Lune ça aurait fini en brasier complet leur relation. Toi, tu as la patience, et surtout ce qu’elle veut apprendre : l’esprit de paix. Elle se fiche bien de savoir se servir de ses griffes et de ses crocs, d’ailleurs elle ne sait pas le faire … » Il prit une grande inspiration comme pour annoncer un témoignage poignant ou une révélation choc. « Puis tu la comprendrais mieux que quiconque. Tu dois certainement te demander « mais qu’est – ce qui a pu intéresser tant mon frère dans cette gamine ? » à vrai dire j’en sais rien moi-même. Je me dis juste que c’est une gamine qui a pas eu la vie facile, c’est une soi disante laide, rejetée, malformée, malfichue et mise sur le côté depuis qu’elle est jeune. Vraiment Vipères. Vous pourriez faire un travail formidable. »

Il soupira. Esprit des Chimères était dans un étrange dilemme. Il ne pouvait pas balancer comme ça à sa sœur le passé en détails de l’apprentie. De toute manière, il savait juste que c’était une raillée puis cet apprenti à la con lui avait brisé le cœur. Le caractère de l’apprentie ainsi que son passé qui lui rappelait étrangement quelque chose n’avait qu’amplifier l’affection qu’il éprouvait en son égard. Voir Vipères la prendre pour une sorte de fardeau et une responsabilité anodine serrait son cœur sous l’incompréhension. Au fond de lui il priait pour qu’elle change d’avis et qu’au final, mentor et apprentie soient inséparables, de vraies confidentes comme il avait pu le voir sur d’autres couples d’entraînement.
C’est en gommant ses pensées utopistes qu’il reporta son attention sur sa sœur, son sourire tordu au visage.
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MessageSujet: Re: « La guerre de Troie n’aura pas lieu. » ▲ priorité à Esprit des Chimères.   « La guerre de Troie n’aura pas lieu. » ▲ priorité à Esprit des Chimères. Icon_minitimeLun 28 Juil - 14:28



« Je la sens pas. »


Esprit des Chimères ne la croyait pas, et ça lui brûlait le ventre d’être si peu crédible.
Vipère détestait devoir argumenter, elle détestait qu’on lui ressasse le même sujet sans cesse, pour lui faire croire qu’elle allait mal, parce qu’elle se sentait menteuse à l’idée de dire qu’elle souffrait, alors qu’elle était juste habituée à son quotidien. Elle écouta d’une oreille un peu distraite les dires de son frère, puis, sans répondre, enchaina sur un autre sujet, ne trouvant pas d’intérêt à argumenter en faveur de sa bonne santé. Nuage de Chrysalide était une bonne échappatoire, vu l’attention que le félin écaille porta immédiatement au sujet. C’était étonnant ; Etoile des Vipères avait rarement vu son frère s’intéresser autant à quelqu’un qui ne soit pas une de ses sœurs, et autant elle craignait un peu pour son frère, autant elle était mortellement curieuse de savoir ce qu’il lui trouvait. Elle éprouvait envers la gamine noire un peu de mépris, aussi ; elle lui évoquait un mauvais reflet, une petite faussement hargneuse et amaigrie, comme elle l’était elle-même. C’était fortement désagréable d’avoir l’impression de se voir elle-même avec quelques années de moins lorsqu’elle regardait la gamine. C’était irritant. Il prononça quelques phrases sibyllines, comme quoi elle voulait apprendre l’esprit de paix, et ne pouvait pas se battre, dieu sait pourquoi. Une question se mit à brûler son esprit ; si elle lui ressemblait tant, pourquoi il ne l’avait pas prise lui sous son aile, au lieu de lui avoir refilé alors qu’il savait mieux que quiconque qu’elle détestait avoir un mentorat ?
Il pensait qu’elle comprenait la gamine mieux que quiconque. Pour le moment, il lui semblait qu’elle lui était plus insupportable que n’importe qui d’autre. Là où les autres voyaient en elle un souffre-douleur ou quelqu’un à mépriser simplement pour la forme, Vipère voyait une gamine qui cherchait à s’incruster dans leur petit paradis triangulaire, et à en mettre en péril l’équilibre en le transformant en carré. Il disait qu’elles pouvaient faire un travail formidable ; elle pensait qu’elles étaient voués à un mutisme infini.

« Je ne pense pas, Chimère. Je ne pense vraiment pas. »

Elle savait que ça allait déclencher chez lui des émotions négatives de savoir qu’elle ne croyait absolument pas en ce mentorat, mais elle ne se tut pas pour autant, et continua.

« Je n’aime pas qu’on nous regarde de la même façon qu’elle nous regarde. Je ne suis pas son amie, ni son égale, ni quoique ce soit d’autre que sa chef ou son mentor. Je n’ai pas à être un modèle ou quoi. Je suis Etoile des Vipères, elle est Nuage de Chrysalide, et c’est très bien comme ça. Tu lui as choisi la voie de la facilité en me la collant dans les pattes. Tu sais très bien qu’il m’a fallu des lunes à me battre moralement avant que mon mentor comprenne que je ne voulais pas me battre physiquement, et que ça a été la clé de notre bonne entente. Comment veux-tu qu’elle devienne quelqu’un de bien si on lui donne tout avec une cuiller en argent dans la gueule ? Se battre contre ses égaux, c’est une chose ; se battre pour faire entendre sa voix, c’en est une autre. »

Elle jeta un regard profond à son frère, tout en agitant légèrement la queue, avant de reprendre.

« Je sais que tu veux que j’entraine Nuage de Chrysalide avec mon cœur, mais je le fais avec ma raison, Chimère. J’ai trop de détracteurs dans le clan pour risquer qu’on me déteste encore plus, je ne veux pas d’une guerre civile, je veux juste qu’on me respecte et qu’on accepte mes positions. Or, ce que tu appelles mon « esprit de paix », c’est pas le genre de position qu’on accepte. Si je commence à l’inculquer à tous les gamins autour de moi, on va directement parler de lobotomie des enfants, de manipulation, de tout ce que tu veux qui n’arrangera pas nos affaires, et encore moins les miennes personnellement. Tu as déjà vu la tête qu’ils tiraient quand j’ai annoncé que Nuage de Chrysalide serait ma novice. J’en ai entendu dire qu’on s’était bien trouvées entre tarées. Je ne veux plus entendre ça, et je ne veux pas non plus que cette gamine prenne ses aises sous couvert qu’elle a nos deux protections. »

Cela dit, la femelle jeta un regard entendu à son frère. C’était éprouvant d’être meneuse, elle était éreintée. Elle en avait marre des regards noirs que portait le clan sur elle alors qu’elle s’efforçait de tout faire pour contenter chacun. La marginalité de toute sa famille n’arrangeait rien, et maintenant qu’elle avait Chrysalide sous son aile, les gens parlaient d’une sectarisation de la différence. Ca ne voulait rien dire. C’était aberrant. Elle soupira, avant de reprendre la parole.

« Je ne sais plus ce que je dis. Je ferais ce que je peux avec elle, mais je suis fatiguée. Les gens ont l’impression qu’on se regroupe entre mal intégrés pour comploter contre eux. Et puis je la sens pas. Je ne sais pas pourquoi, enfin, ça me fout mal à l’aise d’avoir l’impression de me voir dans un miroir. Ca t’enlève l’impression d’être toi-même. »
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MessageSujet: Re: « La guerre de Troie n’aura pas lieu. » ▲ priorité à Esprit des Chimères.   « La guerre de Troie n’aura pas lieu. » ▲ priorité à Esprit des Chimères. Icon_minitimeMer 6 Aoû - 0:13



Si tu ne m’aimes plus,
je t’aimerais à travers d’autres



Elle continuait à mépriser la gamine.
Esprit des Chimères leva les yeux au ciel. Il ne comprenait pas la haine envers Nuage de Chrysalide, et la dernière raison énoncée eut le don d’agacer le guérisseur. Une impression de dépersonnalisation ? Il ne savait pas comment prendre cette raison. Un sentiment de déception et d’incompréhension envahit le petit mâle écaille. Avec tous ses efforts, il ne pouvait pas s’empêcher de trouver la réaction d’Etoile des Vipères puérile, égoïste et prétentieuse.

« Il y a d’autres pacifistes sur Terre, il va falloir t’y habituer, ma Vipères. »

Il avait balancé cette phrase avec son air de blasé qu’il prenait pour les autres. Il s’insultait de changer soudainement de masque avant l’Assemblée devant sa sœur. Elle avait peut – être peur de ça, d’ailleurs : qu’il ne change de trop et qu’il ne prenne position seulement pour l’apprentie noire. Foutaise. Il restait une personne objective malgré tout. Si ses sœurs avaient tort, il n’avait aucun mal à les prendre à part pour leur dire qu’il était en désaccord avec elles. Manque de chance pour ces dernières, il était guérisseur, donc il avait le droit de choisir et de trier les décisions du chef. C’était tout de même dingue ce qu’il se mettait à penser quand on touchait à une de ses rares amies. Il ne savait pas comment faire comprendre à Etoile des Vipères son besoin de la protéger. La comparaison de leur relation fraternelle ne ferait qu’envenimer la situation : elle penserait qu’il apprécie Nuage de Chrysalide plus qu’il n’apprécie sa propre fratrie.
Ce qui était complètement faux. Âme Bohème et Etoile des Vipères étaient ses deux compagnes de sa vie, et il le savait pertinemment. C’était une drôle de relation fusionnelle : son désir de porter la réputation de sa fratrie et de ne décevoir personne l’obsédait. Durant un instant, il eut peur d’avoir descendu dans l’estime de sa meneuse. Il se radoucit, conscient de ses paroles. Il avait été puérile, lui aussi.

« Crois moi, Vipères. Confier son apprentissage à un autre guerrier aurait été plus une source de confit et de guerre civile. Voir une apprentie mal au point moralement aurait anéanti la réputation de l’Ombre. Là, on voit en elle une apprentie attentive aux dires de son mentor. De plus, l’admiration qu’elle te porte ne peut que faire monter ta côte de popularité. Tous les guerriers sont ravis de ne pas avoir à se coltiner la « mal foutue insupportable » et te voue un certain respect pour la supporter. » Il osa un petit sourire. « Tu vois, il y a du bon et du mauvais dans cette histoire ! »

Il se fit soudainement confident. Il changeait de côté d’attaque comme on changeait de chemise. Tantôt venimeux, tantôt réfléchi, il ne pensait à ses paroles qu’après coup. Son impulsivité devait certainement lui jouer des tours. Il baissa la tête, soudainement blessé par les propos d’Etoile des Vipères, une seconde fois. Il se rapprocha de sa sœur et lui remit ses plantes devant le visage. Il insistait, il refusait que sa meneuse ne joue avec sa santé comme il le faisait. Soudainement, la somptueuse vipère était devenue un trésor à protéger à ses yeux. Il ne voulait pas qu’elle ternisse, s’effrite pour devenir un monument horrifique comme il le faisait. Esprit des Chimères enfouit son visage dans le flanc de sa sœur et soupira.

« Je suis désolé. Je suis un peu à cran, puis mon humeur fait n’importe quoi. Déjà que je suis lunatique, alors là c’est l’apothéose. » il eut un petit rire nerveux. AHA C’EST PAS DRÔLE. « J’espère que ça ira être vous deux. Je ne peux pas te forcer à l’apprécier, après tout. Je ne peux que te forcer de la considérer comme une boule noire parmi toutes celles que t’as déjà vu. J’espère, je prie, vraiment, pour que ça se passe bien. » Il sourit à sa sœur. « Puis ne t’en fais pas, l’Ombre croit tous les jours qu’on complote, ça fait des lunes qu’on complote à nous trois, faut croire que nos plans sont interminables ou très tordus pour être réfléchi si longtemps … »

Depuis la nomination d’Etoile des Vipères, la fratrie vivait de sa marginalité. Âme Bohème la gamine, Etoile des Vipères la cinglée et Esprit des Chimères l’incapable. Malgré tout, ils allaient redorer le blason de leur Clan, se serrer les coudes, et plonger l’Ombre dans un climat d’aide et de soutien.
Si ce n’était pas du beau complot ça.

Il se décala de sa sœur et fila aller chercher une pièce de nourriture. Il crut voir quelques regards interrogateurs de ses comparses, étonnés qu’il daigne se lever pour aller manger quelque chose. Pour éviter tout soupçon sur la santé de sa sœur, il croqua à contre cœur dans le mulot et remonta à toutes jambes dans l’antre de sa meneuse. Incapable d’avaler quoique ce soit, les vagues souvenirs de sa compagne disparue sonnaient en lui comme une interdiction d’aller bien, une interdiction de manger. Oh non, il n’était décidément plus autorisé à être en bonne santé. Il cracha sa bouchée en entrant dans la tanière d’Etoile des Vipères et afficha son grand sourire de frère épanoui. C’était devenu un maître dans la matière, il connaissait toutes les variantes des sourires. Le sourire dubitatif, le sourire niais, le sourire de côté. Véritablement, il était incapable d’afficher un sentiment sur son visage sans avoir mal.

« Tu dois me trouver tellement chiant. » Comme une potence, il posa le mulot devant sa sœur et s’assit en face d’elle, l’air grave. « Bon. Essaie de manger, je t’en prie. Je sais que t’arrives pas, mais croque dedans, juste une fois. Si tu y arrives, j’essaierais aussi, et on s’en sortira à deux Vipères. T’as trop de trucs en toi qui tournent sans cesse pour te sentir vraiment bien. Si on retire la faim, ça sera déjà ça de moins. »

Malgré cette sensation de lourdeur et de saleté qu’elle ressentait après, il était persuadé qu’à deux, comme frère et sœur écorchés, ils pouvaient s’en sortir, juste avec une entraide de cinglé et une volonté de s’en sortir. La volonté, Esprit des Chimères ne l’avait plus. Pour preuve, il se gavait de coupe faims dans le but d’anesthésier sa douleur. Il y avait décidément trop de choses pour que cette Assemblée se passe convenablement, et le guérisseur commençait à sentir de drôles de sensations, comme une angoisse démesurée. Il tremblait doucement, regardant de partout, s’effrayant à l’idée d’être surpris par une entité. Sa respiration s’accélérait. Incapable de savoir si c’était l’idée de manger ou l’Assemblée qui le stressait à ce point, il se contentait de fermer les yeux pour faire taire ses angoisses, taire ses bruits soudains qui résonnaient dans la caverne.
Même s’entendre respirer et exister l’effrayait.

Spoiler:
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MessageSujet: Re: « La guerre de Troie n’aura pas lieu. » ▲ priorité à Esprit des Chimères.   « La guerre de Troie n’aura pas lieu. » ▲ priorité à Esprit des Chimères. Icon_minitimeSam 16 Aoû - 10:45



« Plus on partage, plus on possède. Voilà le miracle. »


Si Esprit des Chimères savait faire quelque chose à la perfection, c’était bien être vexant. D’ordinaire, il réservait cette attitude aux autres, offrant à ses sœurs le privilège d’un frère attentif et toujours présent pour elle, par amour déjà, et puis peut-être aussi par peur de blesser Bohème, ou de se heurter à une adversaire de taille en la personne de Vipère. Elle ne s’était jamais trop posé la question, partant du principe que c’était normal, que c’était la décence et qu’il n’avait pas à se conduire autrement que de cette façon avec elle, aussi elle lui jeta un regard indescriptible lorsqu’il lui répondit du ton désabusé qu’il utilisait avec le reste du clan, mais jamais, ô grand jamais, avec elle. Instinctivement elle réagit en se fermant, offrant un visage neutre mais clos à son frère, celui qu’elle présentait habituellement au clan et aux inconnus. A tout le monde à vrai dire, sauf aux quelques-uns qui obtenaient ses faveurs. La réaction de Chimère l’irritait. S’il pensait que sous prétexte qu’il était son frère, et son guérisseur, il pouvait lui imposer quoi que ce soit … Il pouvait lui donner son avis, comme tout le monde, il connaissait les bons arguments pour la faire céder, et elle avait l’habitude de faire confiance à ses positions, mais pour rien au monde elle ne se serait pliée sagement à une décision de sa part qu’elle ne cautionnait pas. Et puis, pour Chrysalide, ce n’était pas pareil. Elle l’avait fait par affection pour lui, et peut-être avec un peu de curiosité envers la petite, vu l’attention que lui portait son frère – mais certainement pas parce qu’il pouvait décider à sa place. Elle avait toujours été la plus dégourdie, la grande sœur, et puis de toute façon, elle était une femme, et c’était une raison suffisante pour décider par elle-même.
Au bout de quelques instants, elle vit le visage de son frère se radoucir, tandis qu’il reprenait la parole de la même voix qu’il avait habituellement avec elle, et elle se calma immédiatement elle aussi. Peu importe combien il appréciait Chrysalide, dans tous les cas, elle ne valait pas le coup qu’Etoile des Vipères ne se dispute avec l’unique homme de sa vie. Elle lui fit un léger sourire désolé, tandis qu’il accumulait les arguments pour convaincre sa sœur. Le sourire de cette dernière se fit plus amusé, et plus fier aussi. Il était un vraiment bon parleur. Elle n’avait pas de soucis à se faire pour les palabres tant qu’elle avait de la voix et qu’il était à côté d’elle. A deux, et avec les phrases choquantes par leur innocence et leur double sens que Bohème savait sortir, et qui avaient été la clé de survie de Vipère, ils formaient un trio de choc.

Après quelques instants, Vipère vit son frère se rembrunir, et il s’avança de quelques pas pour venir enfouir son visage dans la fourrure fauve de la meneuse. Elle se tourna pour lui asséner un coup de langue sur l’oreille, frottant sa tête contre l’encolure d’Esprit des Chimères, touchée du geste, mais bientôt rembrunie par le discours qu’il lui tint. Sa dernière phrase, cynique, tira un sourire amer à la meneuse. Des fois, dans des moments de fureur, elle rêvait de se dresser sur le promontoire et de hurler au clan ce qu’elle pensait d’eux, de tous ces faux semblants, de toutes les moqueries qu’elle avait dû encaisser depuis son enfance pour maintenant qu’on l’écoute aimablement et qu’on lui cire les pompes, s’insurger contre leur hypocrisie dévorante, et plus encore contre tout le mal qu’ils avaient faire à sa famille chérie. Ils avaient toujours vécu seuls, retranchés tous les trois les uns sur les autres, et aux rares moments où une quatrième personne avait effleuré leur trio, l’équilibre de l’un d’eux s’était effondré. Vol du Héron l’avait presque tuée, pour la raison ingrate qu’elle ne faisait pas partie du même monde que lui. Il avait joué les gracieux en tendant une patte à l’animal sauvage qu’elle était, avant de la repousser avec écœurement en réalisant les regards que le clan portait sur eux. La chute avait été à la fois la plus misérable et la plus douloureuse de sa vie, tandis qu’elle se découvrait remplaçable, commune, et à la fois diablement différente. Il l’avait remplacée, parce qu’elle était trop marginale, et pourtant il n’avait pas éprouvé de mal à retrouver exactement la même relation avec une autre. C’était paradoxal et effrayant. C’était peut-être pour ça qu’elle fuyait Chrysalide comme on fuit toute responsabilité un peu apeurante. C’était peut-être pour ça qu’elle n’avait jamais hurlé au clan de l’aimer : parce qu’au final, elle se complaisait dans sa solitude.
Ses pensées l’étourdirent. Elle avait cette affreuse impression de toujours se répéter dans son propre esprit. De toujours réfléchir aux mêmes choses. Chaque jour, les mêmes peurs et les mêmes joies revenaient au grand galop dans sa tête, abrutissantes, sonnantes, et à la fois rassurantes par leur régularité. L’assemblée approchant n’arrangeait rien. Avec un peu de chance, une fois ce premier rendez-vous passé, tout irait mieux. Elle craignait uniquement d’être méprisée par les autres chefs et les autres clans, de renvoyer l’image d’une meneuse faible ; tant qu’elle restait digne et n’avait pas à prendre parti, tout irait très bien. Très, très, très bien. Elle se reconcentra sur les mots que venait de prononcer Esprit des Chimères, et lui fit un sourire.

« A vrai dire mon plus gros problème pour le moment c’est pas ta Chrysalide, c’est surtout l’assemblée. Tant qu’elle ne fait pas de gaffe avant ma première assemblée, ça serait cool, tu vois ? Je suis de mauvaise humeur de savoir à l’avance que je risque de passer pour la dernière des connes face à tous ces vieux croutons qui me regarderont avec leur tête de hibou contrarié là, tu vois de quelle tête je veux parler ? Celle qu’on nous faisait tout le temps quand on était gosse et qu’on était là où on était pas censés être. Je suis pas censé être sur un promontoire, mais j’y suis, c’est ma place. J’vais me battre pour y rester, pour faire valoir mon droit d’y être, mais je panique d’avance à l’idée d’y être, et ça c’est pas fun. Alors si Nuage de Chrysalide pouvait éviter de me rajouter des ennuis dans l’esprit aussi près de la pleine lune … » Elle fit un sourire mi-figue mi-raisin. « Ca serait pas de refus. »

Lorsqu’elle eut fini, Chimère se détourna d’elle, sortant quelques instants. Interdite, elle fixa la porte de lichen par laquelle venait de sortir le guérisseur. Est-ce qu’elle avait dit une connerie ? Est-ce qu’il allait chercher Chrysalide pour s’expliquer ? Est-ce qu’il était vexé ? L’effluve écœurant de la viande lui donna une réponse, et elle l’entendit cracher quelque chose tandis qu’il entrait dans sa tanière. Assise bien droite au milieu de l’antre, Vipère planta son regard perçant sur lui, tandis qu’il essayait de lui vendre un grand sourire. Chim, mon brave Chim, tu peux vendre des cailloux comme des diamants à n’importe qui, sauf à moi. Il posa devant elle une pièce de viande et chercha à l’amadouer par quelques mots. Mange et je mangerais. Bah bien sûr, faut pas prendre des vessies pour des lanternes non plus Chimère. Elle jeta un regard à la proie devant elle, puis braqua à nouveau ses prunelles mordorées dans le regard de son frère, cherchant à lui montrer par la force de son regard blasé qu’elle n’était pas dupe. S’il ne le voyait pas, c’était qu’il était vraiment fier de son coup. Ou qu’il ne la connaissait plus. Ou qu’il voulait pas voir. Un aveugle l’aurait lu à des kilomètres. C’était la dernière personne à qui on pouvait faire ce coup foireux, quand même.

« Ouais, ça, pour être chiant, t’es chiant. » lâcha-t-elle d’un ton désabusé. « Ecoute Chim. » Elle marqua une pause, pour le forcer à la regarder dans les yeux. « Tu peux faire croire ce que tu veux à n’importe qui, parce que tu t’en fous, et parce que t’es un bon menteur. Mais tu sais très bien que moi, tu peux pas m’avoir sur des trucs aussi flagrants. J’ai pas envie de me sentir dupée en faisant ça pour toi et en te voyant recracher un morceau à peine sorti de ma tanière, ou te gaver de tous les vomitifs et les coupes faim que tu trouveras dès que tu auras retrouvé la tienne. » La meneuse se radoucit, passant du regard de celle qui voit la supercherie à celui de celle qui s’inquiète réellement. « Je suis désolée, Chim, je sais que je suis dure dans mes mots … Mais tu comprends, j’ai pas envie que tu me mentes, j’ai pas envie que tu me prenne comme moyen de détourner ton attention de tes propres problèmes, et j’ai encore moins envie que tu mettes toute ton énergie à me soigner et à te laisser mourir. Si t’es plus là, je suis plus rien, Chimère. Je peux pas m’en remettre, t’es trop important. Je crève sans toi. T’as pas le droit de me laisser me battre mais d’abdiquer de ton côté. On a pas besoin d’un miracle. Toi, Bo et moi, on est déjà un miracle. On a survécu tous les trois, on s’est battus, t’as vu où on est ? Il nous manque plus qu’à aller mieux toi et moi. A nous serrer les coudes. A y aller. Mais je peux pas me battre seule, Chim, je peux pas croire bêtement qu’on est deux alors que je te connais par cœur et que je sais que tu joues pas le jeu. »

Elle se tut un instant, et son regard se fit brûlant.

« On va y arriver, Chim. J’te le jure. Je vais manger, et tu vas manger aussi. On ira mieux. Ensemble. On les niquera tous. »

Elle ne sut pas si c’était par besoin de le prouver à son frère, par peur de ne pas être crédible, par fureur de vivre ou pour faire un pied de nez à toutes les voix en elle qui lui susurraient qu’elle n’y arriverait plus, mais elle arracha un morceau de viande sur le mulot. Le coup métallisé du sang envahi sa bouche, écœurant, mais, continuant de fixer Esprit des Chimères droit dans les yeux, elle mastiqua le bout de chair, et finit par l’avaler. Elle fut aussitôt submergée par la dualité de l’impact qu’avait le geste qu’elle venait de faire sur elle. Elle se sentait aussi sale que satisfaite. C’était à la fois une défaite et une victoire. Elle avait peur de perdre ses os saillants autant qu’elle désirait les voir partir. Ca n’avait pas trop de sens, à vrai dire, aussi elle jeta un regard plein de défi à son frère, et avança le mulot d’une patte vers lui.

« J’ai rempli ma part du contrat Chim. Je l’ai mangé. Maintenant c’est à toi. Après je reprendrais une bouchée. Le premier qui perd … »

Elle prit un instant de pause, cherchant qu’est-ce qui pourrait être assez alléchant ou apeurant pour convaincre son frère de jouer le jeu. Un sourire se dessina sur son visage, et son regard se fit mutin, tandis qu’elle reprenait.

« Le premier qui perd doit me trouver des comparaisons assez débiles à faire sur Etoile Nocturne et sur tous les autres chefs pour complètement me déstresser à l’assemblée ! Et j’te préviens t’as intérêt à commencer la télépathie parce que si je perds pied j’aurais besoin de ta p’tite voix dans ma tête pour me dire quoi faire ! »

Elle lui fit un sourire confiant. Ils étaient un miracle. Un putain de miracle.
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MessageSujet: Re: « La guerre de Troie n’aura pas lieu. » ▲ priorité à Esprit des Chimères.   « La guerre de Troie n’aura pas lieu. » ▲ priorité à Esprit des Chimères. Icon_minitimeMar 26 Aoû - 20:26



Le miracle, ce n'est pas Dieu, c'est nous.



Après tout, si elle avait marché dans son délire ? Qu’est – ce qui se serait passé ? Elle aurait mangé, sans se soucier du reste, de savoir si son frère avait avalé quelque chose. Esprit des Chimères se sentait comme une bête sans cœur à ce moment là. Il pensait vraiment que sa sœur fonctionnerait de cette manière ? Non. Etoile des Vipères était leur grande sœur, presque leur mère de substitution. Il baissa les oreilles, presque honteux de sa connerie. Il l’avait prise pour une imbécile et soudainement, la réalité le baffait de plein fouet. Il avait prise sa sœur pour une débile, et il s’en voulait. Esprit des Chimères se releva, prêt à en découdre pour effacer cette pensée. « T’es un bon menteur, tu t’en fous ». Drôle de façon de lui brosser le portrait. Le guérisseur réfléchit. Il s’en foutait, c’était vrai. Il mentait effrontément pour cacher ses vices et ses problèmes, c’était vrai aussi. C’était un bon menteur, oh, excusez moi, c’était un excellent menteur. Il soupirait, fermant les yeux quand sa sœur lui parlait. Les mots lui paraissaient douloureux mais terriblement justes. Etoile des Vipères le connaissait mieux que quiconque, et voir la réalité était étrange. Elle était soudainement orange, rouge, bleuté sur quelques coutures. Elle était douloureuse et fantastique. « Si t’es plus là … » Il frissonnait. Il connaissait la fin. Elle lui disait souvent. Chaque fois, son cœur se soulevait. C’était rare qu’on lui prête un peu de valeur, comme ça, pour une durée aussi longue, sans lui reprendre à la première crasse. « Je ne suis plus rien. » Il se mordit les lèvres et eut un nouveau soupir. C’était réciproque comme sentiment.

Son discours eut un impact formidable sur le mâle écaille. Ils étaient un putain de miracle. Le miracle de l’Ombre, mes frères ! Il leva la tête et eut un sourire déterminé. Aller mieux. Il était persuadé qu’il pouvait le faire, battre ce dégoût, cette aversion qu’il avait face à un lapin, un oiseau, un mulot. Il se faisait battre par des bêtes décédés, quel gâchis, quel lâche dis donc. Il se rendait compte de son état, peu à peu, comme un serpent qui muait. Quand elle se tut, le guérisseur prit une inspiration, accroché à ses lèvres, impatient de voir l’or s’en découler. « Ensemble. On les niquera tous. » Il eut un maigre sourire, celui qu’on fait quand on veut chialer. Il se contenta d’hocher la tête, abandonnant toutes ses craintes, toutes ces apprenties un peu atypiques, ces femelles un peu spéciales, et ces maladies un peu amères. En une fraction de seconde, Vipères était redevenue sa sœur, et la femme de sa vie. Pour toujours.

Elle eut un geste admirable, qui laissa le mâle écaille bouche bée. Elle croqua dans la proie et avala. Il restait là, l’air un peu béat, entre l’admiration et l’incompréhension. Comment ? Comment elle avait réussi ? Il commençait à comprendre que le barrage n’était pas physique, mais purement mental. Il suffisait d’éteindre ses pensées et de se foutre des répercussions, juste le temps d’une seconde, pour arracher et avaler. Il pouvait le faire. Il était plus fort que ces pantins désincarnés. Il en était persuadé. Il était Esprit des Chimères, frère d’Etoile des Vipères et Âme Bohème, fier monarque de l’Ombre, guérisseur aux idées cul de jattes. Il prit une grande inspiration et rit doucement en entendant le défi de Vipères. Elle avait ce don de rendre les pires situations amusantes et les plus grands défis ludiques, d’être une amuseuse et une guerrière à toute épreuve. Sans vouloir paraître présomptueuse, je pense qu’il se sentait fier comme un paon à l’idée d’être le fraternel de cette boule d’énergie.

« T’es magique, Vip. »

C’était certainement pour cette raison qu’il ferma les yeux, fronça les narines, éteignit le petit coucou de sa tête et fondit sur la proie. Il parut maladroit, ses crocs furent hésitants. Il était comme un arachnophobe devant une tarentule. La voix de sa sœur se répétait en boucle dans sa tête. Un putain de miracle. Ils étaient des prophètes pour l’Ombre, la Sainte Trinité, ils devaient accomplir des miracles, guérir l’impossible, redresser le cassé. Ses crocs fondirent sur la chair, il sentit le sang emplir sa gueule et il toussa. Son côté tête brûlée prit le dessus. Il était le puissant, l’inébranlable. Il pouvait combattre une simple maladie. Après tout.
Ils avaient fait bien pire, n’est – ce pas ?

Il inspirait et eut cette sensation pâteuse un long moment. Il fermait les yeux, comme un humain qui mangeait un insecte répugnant. Ne pense plus, s’acharnait – il. Ne pense plus. La pensée était un fléau dans ces situations là. Elle vous harcelait, vous faisait des scénarios tout frais, prête à vous achever si vous faiblissez. Il avala un morceau et sentit une sorte de fierté mais un ultime dégoût. Depuis longtemps, la nourriture avait été associée à quelque chose de négatif chez lui. Malgré le fait qu’il voulait s’en sortir, il n’avait peut – être plus le courage. Il se reposait peut – être sur l’argument de sa santé bancale mais qu’il projetait comme exemplaire. Il était peut – être dans le déni.
C’était surtout ça. Il était dans un profond déni.

Il n’allait pas bien. Quand Etoile des Vipères lui disait, il se contentait de dire que si, il était tout à fait bien, et que malgré son physique déplorable, tout fonctionnait bien dans sa boîte crânienne. Faux. Un tel dégoût de la nourriture était une anomalie. Il voyait dans le mangeur de l’avarice, et dans le chat lambda de l’envie. Il eut envie de vomir, toussait, et sans réfléchir il avalait cette sensation de caoutchouc en même temps que le dernier bout qui lui restait dans la bouche. Il avait réussi.
Putain ouais. Il avait réussi.
Il hésitait entre s’enterrer de honte, fanfaronner comme un paon, se terrer au fond de sa tanière et se bourrer de millefeuille pour se purger, de peur de ne pas avoir cette identité malsaine qu’il s’était formé, sauter au cou de sa sœur comme un chaton en hurlant qu’il avait niqué le destin. Il ne savait pas vraiment ce qu’il avait gagné. Le destin ou son pari ? Il avait obéit à sa sœur et avait remporté leur pari, c’était déjà une bonne chose pour la tête brûlée qu’il était.

« J’ai envie de chialer, Vip. »

Sans réellement savoir pourquoi, il fondit en larmes. Heureux, désemparé, euphorique, déprimé. Tout se mélangeait, il toussait encore, mais riait comme un conquérant. Il leva la tête vers sa sœur et eut un sourire un peu béat.

« Je l’ai fa… Bordel Vip. Je l’ai fais ! T’as vu ça ? Je l’ai buté le mulot ! Il a fini de me bouffer, c’est moi qui l’a bouffé ! Je me suis vengé Vip ! De tous ces connards qui pensent que je suis qu’un cinglé, que c’est qu’une passade, que je suis esclave de mes saloperies ! Vip, on peut s’en sortir ! Oh ma Vipères, on va s’en sortir, on le peut ! La preuve. On est des prophètes, issus d’un miracle, et on continue à faire des miracles sur cette forêt ! Et tu vas tout déchirer à l'Assemblée, je te le promets. »

Il lui offrit un vrai sourire franc, heureux, comme il n’en faisait plus. Il était heureux, un peu honteux et anxieux par rapport à sa proie avalée, mais putain, il était heureux.
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